Assieds-toi et marche !

13 Sep, 2022

«Aussi loin que me portent mes souvenirs, il me semble avoir été en résonance avec une certaine forme de sacré. Celle qui émane des lieux étonnamment vivants de la présence d’êtres disparus. J’ai éprouvé très tôt une émotion et une sensibilité très particulières qui ne ressemblent à aucune de celles qu’on éprouve d’ordinaire devant ce qui est beau et attrayant. Cette émotion et cette sensibilité étranges m’entraînent sur des chemins inconnus et vers des horizons improbables, qui se situent là où on ne les attend pas.»

Pierre Lunel

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Préface

 «  Assieds-toi et marche  ! » Ce titre paradoxal est une invitation au véritable voyage : celui qui commence immobile, dans notre tête et notre cœur, à la recherche d’une résonance qui nous fera pénétrer l’âme d’un lieu. Cette expérience a bouleversé la vie de l’auteur, universitaire de haut vol et grand marcheur devant l’Éternel. Car le voyage, s’il n’est qu’un déplacement, un dépaysement, une simple curiosité touristique ou culturelle, ne débouche sur rien d’important. Il demeure figé dans les souvenirs qu’on en rapporte.

Aujourd’hui, la découverte d’un site, « immortalisée » en direct par les vidéos et les selfies prenant le pas sur le regard, se résume trop souvent à : Voilà où j’étais. Mais qui suis-je ? Le sais-je mieux, une fois rentré chez moi ?

La marche, c’est bien. En faire une véritable démarche, c’est mieux. De même qu’il est conseillé de rêver sa vie avant de la vivre, on a tout intérêt à commencer le voyage par un travail intérieur, sans quoi l’on ne sera que le produit des circonstances, risquant de passer à côté de ce qu’on cherche.

« Médite, et les montagnes viendront à toi », disait l’alpiniste Roger Frison-Roche, dont les livres explorent si bien « l’imaginaire du lien ». Le vrai voyage, ce n’est pas faire l’Inde, l’Amérique du Sud ou la Bretagne, c’est leur donner un surcroît d’existence en accueillant les énergies et les êtres qui en ont constitué l’âme. Bien sûr, d’aucuns préféreront partir à l’aventure sans préparation, pour privilégier l’effet de surprise. Mais, comme le dit un proverbe persan, le hasard sourit aux gens préparés.

Pierre Lunel sait de quoi il retourne. Brillant historien du droit, ancien président de l’université Paris VIII, il a longtemps suivi un parcours fléché avant de changer l’orientation des flèches. L’itinéraire obligé s’est ainsi transformé pour lui en chemin de liberté au service du sens – ce mot singulier qui procède de toutes ses versions plurielles, les cinq organes de perception physique et ce fameux sixième sens destiné à dissiper les illusions de la matière. Pierre Lunel s’est mis à nu, il est sorti du carcan de ce qu’on lui avait appris, de ce qu’il enseignait, afin de trouver sa voie intérieure par le travail des émotions.

La foi, chez lui, naît du désir qu’elle sublime. Pour devenir vraiment celui dont il ressentait l’appel, il s’est confronté aux grandes sources de la lumière spirituelle, de la générosité active et du mystère contemplé, disséqué, transcendé. Il a recueilli les confidences de Sœur Emmanuelle, de l’abbé Pierre, de la grande mystique indienne Amma, étudié le chamanisme, enquêté avec une rigueur exemplaire sur tous les dossiers médicaux des guérisons inexpliquées de Lourdes Et il nous donne aujourd’hui, dans ce livre, les clés qui lui ont ouvert des portes insoupçonnées sur tant de lieux et d’êtres exceptionnels.

Avec lui, nous ne voyageons pas seulement d’Assise à Tibériade, de la mer d’Arabie à la jungle amazonienne en passant par l’Inde via le Morbihan, nous épousons le regard et partageons les vibrations des grands initiés, des guerriers de l’amour, des souleveurs de montagnes : Jésus, Marie-Madeleine, François d’Assise, Padre Pio, Yvonne[1]Aimée de Malestroit, Amma… Nous plongeons au cœur de l’énergie sacrée, celle des pierres, des forêts, des lieux façonnés par l’âme et les rêves.

« L’énergie sacrée, écrit-il, n’est ni une énergie fossile ni une énergie renouvelable. Elle possède sa propre logique, son rythme, sa survenue, sa propre fin. Issue de l’Infini dont nous sommes partie, elle met au défi l’espace et le temps. » Son style solaire, pénétrant, ascendant, véritable sentier de randonnée pensé pour notre plaisir et nos différents niveaux d’évolution, est lui-même un voyage à la découverte du pouvoir des mots, de leurs associations d’idées, de saveurs, de mystères éclairants Un voyage tout aussi musical qu’imagé, mêlant constamment l’universel à l’intime.

Il y a du Confucius en Pierre Lunel : « Le plus grand voyageur est celui qui a su faire une fois le tour de lui même. » Il y a aussi de l’Antoine Blondin – je pense à Nous rentrerons à pied, l’une des nouvelles de son recueil Quat’ saisons  : l’histoire d’un homme qui s’embarque pour un tour du monde en solitaire, avec les provisions et les cartes nécessaires, mais sans quitter son anneau parisien du quai de la Conférence. « J’aime la mer et ses rites obligés, écrit Blondin, non les habitudes déménagées qu’imposent les voyages. Un peu plus aventureux, je me serais fait jardinier. »

Pierre Lunel est un jardinier de l’âme, qui nous offre les fruits jubilatoires de sa quête spirituelle. Et, surtout, il nous donne les moyens de cultiver ceux qui ne demandent qu’à germer en nous.

Didier van Cauwelaert

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