Suivez ici tous les 15 jours la méditation de Pierre Lunel sur l’ esprit d’ enfance.
L’ esprit d’enfance est une grâce. Le conserver durant toute sa vie est possible. Il s’agit de faire de sa vie un émerveillement.
Devant les périls qui nous entourent l’esprit d’enfance nous maintient dans l’ espérance.
On ne sait rien d’un enfant… D’où vient-il et n’est-il que le fruit improbable d’une rencontre de cellules ? Est-il animé d’un souffle qui vient d’un ailleurs indistinct comme un grand vent chargé de paroles inaudibles ? Ce souffle possède –t’il une âme , copeau infinitésimal détaché de l’âme universelle pour bénir l’arrivée d’une forme de vie ? J’aime à croire ne pas être simplement le produit d’un ovule et d’un spermatozoïde issu d’un spasme répondant à une pulsion déclenchée par un désir. Je refuse d’être le produit d’un désir-pulsion-spasme. Je suis celui de deux âmes qui ont animé deux corps par un amour issu de l’âme universelle que l’on appelle Dieu, la Conscience universelle ou encore l’infini. J’ai été conçu par une reine qui se nomme la Vie. Libre à chacun de croire ne devoir la vie qu’à une rencontre de cellules comme il est libre de croire mourir en quittant son corps terrestre .
Ma conviction est qu’avant d’être , j’étais et qu’après mon corps, je serai , d’un côté comme de l’autre dans le toujours de l’au-delà du temps. Avant mon corps, il y a la création et avant la création il y a l’amour issu de cette âme universelle qui est l’énergie première. L’amour est de toute éternité et comme elle, il ne connaît ni le début ni la fin. Je ne crois pas que l’amour soit né avec l’homme ni avec les animaux, les arbres, les plantes, ni avec le vent, la pluie , le soleil, la lune. Il est d’Avant, avant toute chose, avant le créé, avant toute vie. « Et le Verbe s’est fait chair »…
L’amour est la parole première, d’un temps , celui de toujours où il n’y avait pas encore de mots pour le dire, ni de pensée pour l’élaborer ni de cœur pour l’éprouver. L’amour et la vie ne font qu’un. Parole première ou syllabe sacrée, ou énergie primitive issue d’une étincelle, l’amour crée toute vie. Il anime l’incarnation sous toutes ses formes, la nôtre mais aussi la terre avec tout ce qui vit et aussi l’univers. L’amour est cette parole qui n’a pas besoin d’être dite, comprise ou ressentie pour être.
Je suis donc issu de deux cellules baignées dans une parole qui parle de toute éternité. C ’est pourquoi, vous, moi, tous , nous sommes sacrés. Le sacré est une vérité qui n’a jamais besoin d’être dite ni prouvée. Est sacré tout ce qui est du monde en étant plus que ce monde, tout ce qui est vivant en étant plus que la vie, tout ce qui semble mortel en étant pourtant infini. Ma plus merveilleuse recherche sera de découvrir en moi le Sacré qui m’ouvrira la porte sur cette partie de mon être destinée à l’Infini.
La vie est donc sacrée et c’est pourquoi elle est si mystérieuse . Elle possède le mystère sacré des commencements et elle n’est jamais aussi sacrée que dans l’enfance. C’est sans doute pourquoi les adultes semblent coupés de leur enfance parce qu’ils passent d’un monde sacré à un autre qui ne l’est plus. Enfant, le sacré passe par ces mots « j’aime », sans l’aide d’un dictionnaire ou d’un instituteur car ils viennent de l’âme sans qu’on le sache vraiment .
Enfant, ces mots s’imposent comme une respiration . Ils sont sans naissance et sans fin parce que les mots de l’âme ne naissent ni ne meurent, ils naissent de l’infini pour rejoindre l’infini et informer la vie, hier, aujourd’hui, demain dans un circuit sans fin.
L’homme est coupé de son enfance parce qu’il avait le choix d’y demeurer et qu’il ne l’a pas fait. Il a refusé cette liberté sacrée entre toutes de demeurer enfant c’est à dire d’être un adulte avec une âme d’enfant. Peut-être faute de courage d’affronter la vraie vie, celui de regarder le monde avec des yeux d’enfant et préféré le plaisir évanescent au bonheur qui perdure. Le temps a fait son œuvre ; l’ âme se ride et s’affaisse en même temps que le visage et le corps . On abandonne jusqu’au souvenir de son âme d’enfant et avec elle le vrai bonheur un court instant vécu. On consent par lâcheté à laisser les ans dévorer l’ éternité , on sacrifie son innocence et le bonheur de l’éternel instant au profit de vanités survenues le matin pour s’évanouir au crépuscule. On préfère la succession des jours et des nuits à la lumière qui ne s’éteint jamais .
Ne soyons pas surpris de ne pas se souvenir de ce que fût l’enfance puisque on a accepté de la quitter. Le sacré n’aime pas laisser de trace à celui qui l’oublie et il est déstabilisé par ce qui échappe à l’instant car l’instant seul est sacré. Le sacré n’aime ni la nostalgie ni le cynisme , il n’est ni dans le regret ni dans la demi -mesure, puisqu’il est absolu.
Devenu vieux, le soleil n’éclaire plus l’ âme comme dans un jour qui jamais ne s’achève. La perception de l’instant présent s’évanouit à force de trop de nuits, de trop de doutes, de trop de vanités . C’est pourquoi sans doute , avec le temps même les vieilles choses se mettent à sentir bon de notre enfance mais c’est là un parfum qui s’évapore vite . Peu à peu, l’éternité s’en va ne laissant au temps qui fuit que des lambeaux de mémoire . Des lambeaux à la mesure de leur inutilité, ici un succès, là une conquête, ici un gros chagrin ; jamais rien qui soit essentiel comme le souvenir vivant de mon bonheur d’enfant. Celui de l’instant. On quitte le torrent de l’éternité pour un ruisseau qui s’achève. En devenant grand, on se fait tout petit. On se contente du désir de ne pas vieillir pour éviter de mourir, on veut éloigner la déchéance du corps plutôt que de se rapprocher de son âme abandonnée dans l’ enfance…
Nous sommes devenus les produits d’une illusion. Nous n’avons pas compris ce qui arme d’énergie l’hélice de nos vies et nous avons confondu la vie avec les battements du désir .
À suivre…
0 commentaires